Le Magal de Touba et le 18 Safar :

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Le Magal de Touba et le 18 Safar :

Le Magal de Touba et le 18 Safar :

Une tradition sacrée
Le Magal de Touba est un événement majeur qui se déroule chaque année le 18 Safar du calendrier musulman. Cette célébration, profondément ancrée dans la tradition sénégalaise, commémore le départ en exil au Gabon de Cheikh Ahmadou Bamba, le fondateur de la confrérie mouride. Le Magal attire des millions de pèlerins à Touba, transformant la ville sainte en un centre spirituel vibrant et en un carrefour culturel unique.
Cette célébration a une influence considérable sur la vie religieuse, sociale et économique du Sénégal. Le Grand Magal de Touba est bien plus qu’un simple rassemblement religieux. Il représente un moment pour réfléchir, renouveler sa foi et renforcer les liens communautaires. Nous allons explorer à travers cette modeste contribution, l’histoire du Magal, son déroulement, sa dimension spirituelle et son impact socio-économique, offrant un aperçu complet de cet événement significatif.

L’origine historique du Magal de Touba
L’origine du Magal de Touba remonte à la fin du XIXe siècle, dans un contexte de domination coloniale au Sénégal. À cette époque, l’Islam était perçu comme un obstacle à la stratégie de domination politique et d’aliénation culturelle du colonisateur.
C’est dans ce climat difficile qu’apparut Cheikh Ahmadou Bamba, né en 1853 à Mbacké, avec pour mission de secourir ses concitoyens persécutés.

L’exil de Cheikh Ahmadou Bamba
Le 18 Safar 1306 de l’Hégire (10 août 1895), Cheikh Ahmadou Bamba fut arrêté à Djéwal et exilé au Gabon. Cette décision fut prise le 5 septembre 1895 par le conseil privé dirigé par le gouverneur général Louis Mouttet.

Le 21 septembre 1895, il embarqua sur le paquebot brésilien Pernambuc à destination du Gabon
Pendant sept ans, Cheikh Ahmadou Bamba vécut en exil, dont cinq ans à Mayumba et deux ans à Lambaréné, dans des conditions extrêmement difficiles.
L’objectif de l’autorité coloniale était sa suppression pure et simple.

La signification du 18 Safar
Le 18 Safar marque le début de l’exil de Cheikh Ahmadou Bamba au Gabon.
Cette date a une signification profonde pour la communauté mouride. Cheikh Ahmadou Bamba lui-même a instauré cette commémoration pour remercier Dieu de l’avoir soutenu durant son exil et pour célébrer son retour.
Dans son poème « Mawâhibou-l-Qouddoûs », le guide religieux exprime sa gratitude envers Dieu malgré les épreuves traversées : « Je rends grâce à Allah qui m’a sauvé des mains des mécréants, me gardant sain et sauf malgré leurs pièges et machinations ».

L’évolution de la célébration
À l’origine, chaque talibé célébrait le Magal individuellement, conformément aux recommandations du Cheikh.
Avec le temps, le deuxième calife, Cheikh Muhamad al-Fadel, a eu l’idée de rassembler tous les mourides à Touba.
Cette initiative visait à renforcer la cohésion de la communauté et à créer des échanges sociaux et économiques entre les ruraux et les citadins.
Aujourd’hui, le Magal de Touba est devenu un événement majeur au Sénégal, attirant des millions de pèlerins à Touba chaque année. Depuis décembre 2013, le jour du Magal est férié, soulignant son importance dans la vie religieuse et culturelle du pays.

Le déroulement du Grand Magal
Les rituels religieux
Le Grand Magal de Touba est une célébration religieuse profondément ancrée dans la tradition mouride. Les pèlerins se rendent à Touba pour accomplir divers actes de dévotion. Parmi les rituels les plus importants, on trouve les visites pieuses aux sanctuaires et mausolées des différents Khalifes et guides religieux reposant dans la cité sainte. Ces visites permettent aux disciples de renouveler leur engagement spirituel.
Les fidèles participent également à des récitations du Coran, des séances de Zikr (rappel de Dieu), et à la lecture des « Khassaïdes » (poèmes) de Cheikh Ahmadou Bamba.
Des causeries sur le Prophète Muhammad et sur les hommes pieux sont également organisées, renforçant ainsi la dimension spirituelle de l’événement.

Les festivités et rassemblements
Le Magal n’est pas seulement un moment de recueillement, mais aussi de festivités. Un élément central de ces célébrations est le « Berndé », une tradition instaurée par Cheikh Ahmadou Bamba lui-même. Il s’agit de la préparation de mets copieux et de repas destinés aux hôtes et aux plus démunis. Cette pratique vise à faire ressentir à chacun que le Magal est également un moment de fête et de partage.
L’accueil des pèlerins
L’afflux massif de pèlerins à Touba pose des défis logistiques considérables. En 2024, la ville sainte s’attend à accueillir plus de 5 millions de fidèles. Pour faciliter le transport, le gouvernement a mis en place des liaisons spéciales entre Dakar et Touba, avec des bus à prix abordables. Malgré ces efforts, l’affluence reste « monstre », selon un employé chargé de la gestion des transports.
Face à cet afflux, les autorités sanitaires ont également pris des mesures. Environ 6 000 professionnels de santé sont mobilisés, avec 186 sites de santé mis à disposition des pèlerins. Des mesures d’hygiène, comme le lavage des mains et le port du masque dans les zones de forte promiscuité, sont également préconisées.
La dimension spirituelle du pèlerinage

La quête de bénédictions (baraka)
Le Grand Magal de Touba a une signification spirituelle profonde pour les pèlerins mourides. Cette célébration est l’occasion pour les fidèles de rechercher la baraka, ou bénédiction divine. Les pèlerins accomplissent divers rituels pour s’imprégner du sacré et obtenir ces bénédictions.
Parmi ces pratiques, on trouve la circumambulation partielle autour de la mosquée, l’attouchement des mausolées et des reliques, ainsi que la consommation du sable et de l’eau bénite.

Le renouvellement de l’allégeance
Le pèlerinage permet aux disciples de renouveler leur engagement envers la confrérie mouride. C’est un moment pour se rappeler son identité et vivre son attachement à la communauté globale. Les fidèles effectuent des visites pieuses (Ziyâra) aux cheikhs, renforçant ainsi leurs liens spirituels avec les guides religieux.
Ces actes de dévotion sont considérés comme essentiels pour maintenir et approfondir la foi des croyants.

La communion avec le guide
Le Magal offre une opportunité unique de communion avec le guide spirituel. Les pèlerins cherchent à se rapprocher de l’essence de Cheikh Ahmadou Bamba et de ses enseignements. Cette proximité spirituelle est recherchée à travers diverses pratiques, comme la récitation des « Khassaïdes » (poèmes) du fondateur. Les fidèles participent également à des séances de prières collectives et à des causeries sur le Prophète Muhammad et les hommes pieux, renforçant ainsi leur connexion spirituelle.
La dimension spirituelle du pèlerinage se manifeste également dans les épreuves endurées par les pèlerins. Le voyage, sa longueur, la foule, la chaleur et l’attente sont perçus comme des éléments contribuant à l’expérience spirituelle. Ces difficultés sont considérées comme légitimes au regard des promesses de rédemption et de purification liées à la captation du sacré.

L’impact socio-économique du Magal
Le développement de Touba
Touba est devenue un véritable modèle économique, considérée comme la deuxième ville économie du Sénégal après Dakar.
Cette croissance rapide est due à la délocalisation d’activités économiques et à une migration importante. La ville sainte a connu un essor remarquable, avec une diversification des activités économiques centrées principalement sur le commerce et le transport.
Les retombées économiques
Le Grand Magal de Touba a un impact économique considérable sur l’économie nationale. Une étude a révélé que l’impact global de l’événement s’élève à plus de 249 882 782 297 FCFA.
Les secteurs du commerce, du transport et de la téléphonie connaissent un essor particulier pendant cette période. Certaines entreprises réalisent jusqu’à 60% de leur chiffre d’affaires annuel lors du Magal.
La solidarité mouride
La diaspora mouride joue un rôle crucial dans le financement du Magal. Leur contribution dépasse largement les 500 000 euros (soit plus de 327 millions de francs CFA).
Ces fonds servent à améliorer les infrastructures, assurer la sécurité et offrir des services aux pèlerins. La solidarité mouride se manifeste également à travers le « Berndé », une tradition de partage de repas copieux avec les hôtes et les plus démunis.


Conclusion
Le Grand Magal de Touba se révèle être un événement d’une importance capitale, ayant une influence profonde sur la vie religieuse, sociale et économique du Sénégal. Cette célébration annuelle ne se limite pas à un simple rassemblement religieux ; elle offre une occasion unique aux fidèles de renouveler leur foi, de renforcer les liens communautaires et de vivre une expérience spirituelle intense. L’impact économique considérable du Magal, couplé à son rôle dans le développement de Touba, souligne son importance bien au-delà de la sphère religieuse.
En fin de compte, le Magal de Touba incarne l’harmonie entre tradition et modernité, entre spiritualité et progrès économique. Il met en lumière la force de la solidarité mouride et son pouvoir de transformation sociale. Alors que cet événement continue d’évoluer, il reste un témoignage vivant de l’héritage durable de Cheikh Ahmadou Bamba et de l’influence persistante de ses enseignements sur la société sénégalaise contemporaine.

Amadou SYLLA
Talibé Mouride – Depuis Paris

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